Le président de la Fédération autonome de la fonction publique (FA-FP) regrette le manque de considération par l'exécutif des représentants du personnel dans le cadre de la réforme à venir de la fonction publique. Si la participation aux élections professionnelles du 6 décembre est forte, “cela voudra dire que les organisations syndicales ont toute leur place et le soutien d'une grande partie des agents publics”,estime-t-il.
Quels enseignements tirez-vous de la concertation sur la réforme de la fonction publique ?
Si l'on exclut le projet de protocole d'accord sur l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes dans la fonction publique (qui, pour nous, a fait l'objet d'une vraie négociation), pour le reste, nous en sommes uniquement restés à des réunions d'information. Ce n'était ni de la concertation et évidemment pas de la négociation. Cela ne veut pas pour autant dire qu'il n'y a eu aucun dialogue. Nous reconnaissons que nous sommes reçus régulièrement en bilatérales, qu'il y a du temps accordé aux échanges, mais il n'en ressort rien, malheureusement. Ce que nous disons, c'est que, depuis l'installation du gouvernement d'Édouard Philippe, nous n'avons jamais assisté à une telle volonté de remise en cause du service public. Bien sûr, il y a eu des précédents sous les anciens gouvernements, mais aujourd'hui, cette volonté est clairement affichée par l'exécutif et le président de la République, Emmanuel Macron, l'a redit à sa manière lors de son discours devant les maires [mercredi 21 novembre, ndlr]. Nous avons le sentiment que le gouvernement ne fléchira pas. Aucun signe ne nous permet de le penser à l'heure actuelle.
Peu d'évolutions à attendre, donc, en matière de dialogue social pour le début de l'année 2019 et notamment pour la présentation du projet de loi de réforme de la fonction publique…
Pour nous, les grands axes du projet de loi de réforme de la fonction publique sont déjà clairement tracés par le gouvernement. Et nous avons franchement le sentiment qu'ils resteront les mêmes, quand bien même les lignes pourraient bouger en matière de représentativité à l'issue des élections professionnelles. Aujourd'hui, cette problématique ne pèse pas dans le débat démocratique, ce qui est terrible. Les corps intermédiaires que représentent les organisations syndicales ne sont pas pris en considération par le gouvernement et, objectivement, nous ne sommes pas confiants sur la manière dont les choses pourraient s'organiser par la suite.
Y aurait-il donc une forme de renoncement de la part des représentants du personnel ?
La lassitude pourrait laisser penser que nous renonçons, mais ce n'est pas le mandat que nous avons. Jusqu'au bout, nous continuerons à faire la démonstration de notre détermination à nous opposer au projet prévu par le gouvernement pour la fonction publique.
Jugez-vous, comme d'autres organisations syndicales, que la politique prévue par le gouvernement contribuera à la “casse” du statut de la fonction publique ?
Chacun y met son terme. De notre côté, nous jugeons que c'est la première fois que nous assistons à une telle remise en cause du service public et du statut de la fonction publique. C'est sur ces valeurs là que l'on a pu construire notre société. Aujourd'hui, il n'y a plus de tabou ni de totem, pour reprendre une expression que nous entendons souvent. Tout est malheureusement ouvert.
Outre la forme, vous critiquez aussi le fond des réformes envisagées par le gouvernement. Pourquoi ?
La démarche du gouvernement est pleine de paradoxes. Nous avons travaillé sur l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes, mais aussi sur la lutte contre les discriminations et nous pensons qu'il y a une part de sincérité du gouvernement sur ces sujets. Mais ces objectifs entrent en totale contradiction avec la réforme des instances de dialogue social voulue par l'exécutif [fusion des comités techniques et des comités d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail ; révision des missions des commissions administratives paritaires, ndlr]. Rappelons quand même qu'elles sont les garantes notamment du déroulement de carrière ou de la représentation des femmes et parfois des hommes selon les filières et les corps. Le regard critique de ces instances sur des sujets aussi essentiels que ceux-ci risque malheureusement de disparaître.
Pensez-vous que les élections professionnelles du 6 décembre seront un thermomètre de la contestation du projet du gouvernement par les agents publics ?
C'est bien sûr l'un de nos arguments de campagne. Si la participation est forte, cela voudra dire que les corps intermédiaires et les organisations syndicales que nous sommes ont toute leur place et le soutien d'une grande partie des agents publics. D'un autre côté, tout plaide aujourd'hui pour que les agents publics nous disent “à quoi sert mon vote ?”. En aucun cas, ce ne sont notre capacité à négocier, notre détermination ni la cohérence de nos argumentaires qui sont remises en cause, mais la démarche unilatérale du gouvernement. Pour autant, nous appelons à la mobilisation la plus large possible, afin de donner aux organisations syndicales la légitimité pour porter leurs projets et ainsi pouvoir s'opposer au projet du gouvernement pour la fonction publique.
Quelles sont les objectifs de votre organisation pour ce scrutin ?
Nous espérons bien entendu progresser. Pour autant, nous ne sommes pas uniquement dans la démarche consistant à dire que nous souhaitons siéger dans tel ou tel conseil supérieur. Nous voulons continuer à faire entendre notre voix, qui n'est pas classée soit dans une démarche purement réformiste soit contestataire.
Selon vous, le gouvernement a-t-il suffisamment communiqué sur le scrutin et ainsi poussé les agents à y participer ?
La campagne de communication du gouvernement intervient un peu trop tard. En tout cas, elle est en totale contradiction avec le discours qu'il a pu porter au cours des derniers mois, à savoir celui consistant à dire que même si une organisation représente tel ou tel pourcentage des voix des agents publics, les lignes ne bougeront pas.
L'unité syndicale affichée au cours des derniers mois peut-elle tenir au-delà des élections professionnelles ?
Non seulement nous l'espérons, mais nous en sommes aussi convaincus. Depuis le début du quinquennat, nous avons porté des choses collectivement et compte tenu de ce qui se prépare pour 2019, nous avons tout intérêt à poursuivre notre unité. Pas sur tous les sujets bien entendu, puisqu'autrement, cela ne servirait à rien d'avoir 9 syndicats ! À l'issue du scrutin, nous pousserons donc pour le maintien de cette unité. Face à ce que nous propose le gouvernement pour la fonction publique, nous ne pouvons pas faire autrement.
Propos recueillis par Bastien Scordia
Source : Acteurs Publics
[28/11/2018]
Covid-19 : la liste des personnels dits vulnérables est étendue
Banque des Territoires - Localtis - 12/11/2020
Lire la suite
Fonction publique : partage possible du supplément familial de traitement pour les parents séparés
Banque des Territoires - Localtis - 10/11/2020
Lire la suite
Suspension du jour de carence : Amélie de Montchalin pointe les difficultés liées au secret médical
Banque des Territoires - Localtis - 10/11/2020
Lire la suite
Fonction publique : le télétravail est renforcé dans les "zones d'alerte"
Localtis - Banque des Territoires - 07/10/2020
Lire la suite
Protection sociale complémentaire des agents : un dispositif "souple" mais perfectible
Localtis - Banque des Territoires - 06/10/2020
Lire la suite